GENÈSE D'UNE PRISE DE CONSCIENCE
LA PREMIÈRE RÉUNION PUBLIQUE
La mairie de Baromesnil convie les habitants du village à une réunion, le
5/10/2002 pour discuter d'un projet d'implantation d'une éolienne sur son
territoire. Peu attirés par le nucléaire et ayant un a priori favorable
quant à l'énergie éolienne, nous décidons d'y participer.
Dans notre esprit, l'électricité, c'est EDF, et là, première surprise, c'est
une société privée qui nous présente son projet.
Les promoteurs annoncent qu'ils vont jouer la transparence, répondre à toutes
nos questions et commencent par nous présenter les avantages de l'éolien :
- "Accord de Kyoto, développement durable, directives
européennes..., pollution évitée, 4000 tonnes de gaz carbonique évitées par
éoliennes de 1,8MW".
Sympa, pour l'instant.
- "EDF va acheter notre courant à prix fixé par
l'état. 20 000F par an pour le propriétaire, 40 000F à 50 000F de taxe
professionnelle par éolienne pour la commune."
Juteux effectivement. Une poule aux oeufs d'or. Pourquoi? Pour qui? Quel sera
le bénéfice des promoteurs qui seront les vendeurs d'électricité à EDF? Et la
perte pour EDF? Qui va finalement payer? Nous n'avons pas eu la présence
d'esprit de poser toutes ces questions.
- "Procédure: mesure du potentiel éolien, raccordement
électrique à Beauchamp -(ce n'est quand même pas tout près)-.
Lignes 20 000V enterrées. Propriétaires contactés.
Contrat de 30 ans. Durée de vie d'une éolienne 15 ans -(pour un projet,
ça va vite)-. Impact visuel et sonore étudiés "
- "Pas de problème de bruit, d'ailleurs 80 personnes
ont visité une ferme éolienne en Allemagne et ils n'ont rien entendu, même au
pied des éoliennes. Les nouvelles éoliennes sont fantastiques et non
bruyantes."
On nous montre une savante courbe qui vient de l'ADEME (Agence de
l'Environnement et de la Maîtrise de l'Énergie, agence que nous verrons se
révéler être un pro-éolien convaincu), qui montre la décroissance du bruit en
fonction de la distance, mais qui n'est pas si facile que ça à exploiter. Les
visiteurs n'ont rien entendu, mais les documents présentés indiquent qu'une
éolienne qui fonctionne fait du bruit. Curieux... Nous indiquons notre
scepticisme, précisons que notre village n'a pas de pollution sonore et que le
calme de la campagne nous semble un bien précieux qu'on doit continuer de
préserver. Nous pouvons encore ici savourer "le silence". Nous demandons s'ils
peuvent nous garantir par contrat qu'on entendra rien. Nous sentons un
malaise, puis une réponse vient : "Non, mais ça ne
dépassera pas l'émergence autorisée par la loi, ou le bruit sera masqué par le
fond sonore ambiant ou le vent." Nous voulons bien admettre que le
bruit ne sera pas très fort, d'après la courbe, mais sa décroissance, rapide
au début, est ensuite très lente et entendre un bruit permanent, qui doit
pouvoir devenir facilement lancinant nous gêne. Quelle curieuse loi! Et
l'effet de masquage nous paraît bien inapproprié pour un bruit. Plusieurs
bruits de même intensité sont quand même perçus avec une intensité plus forte
qu'un seul et l'oreille peut distinguer des sons différents.
- Au vu de la puissance nominale d'une éolienne, il nous semble difficile
d'éviter le nucléaire. Nous nous faisons taxer de "pro-nucléaire". Dur à
avaler!"1200 foyers alimentés par éolienne", nous
rétorque-t-on.
- On nous présente une dizaine de lieux possibles d'implantation. Nous
voulons écarter les endroits les plus proches des habitations, mais nous
n'avons aucune réponse. Stupidement, nous croyions que l'assemblée allait
discuter sur le choix de l'implantation de notre éolienne.
- Nous sentons que les promoteurs marchent sur des oeufs avec l'impact
visuel, mais nous n'avons pas un a priori négatif sur le sujet. On nous
présente des photomontages. Une éolienne surgit dans la plaine. C'est
difficile de juger sur une photo. Puis d'autres éoliennes l'accompagnent
bientôt, au loin (pourtant, la plaine n'est pas si grande). Quelques vues de
l'intérieur du village, mais sans voir les maisons, avec une éolienne en
partie dissimulée par les arbres, nous sont aussi
montrées."100 mètres de mât". C'est vraiment
beaucoup, on doit pouvoir les voir de très loin. Les montages rendent-ils
vraiment compte de la réalité? Sur les photos, les éoliennes sont immobiles et
mises en valeur.
- Cela nous semble demander beaucoup de réflexion avant de nous engager
positivement. Mais pourquoi nous avoir montré tant d'éoliennes? Il nous semble
qu'il faille étudier de près le problème et ne pas se précipiter. Il faut
insister lourdement pour obtenir une réponse qui finit par venir :
" le but est d'implanter 10 éoliennes sur Baromesnil, 4
sur St Rémy et 4 sur St Martin". Le maire ne dit mot, mais sa surprise
est manifeste et il blêmit. Baromesmil, pris en étau par 18 éoliennes. Nous
accusons le coup et comptons déjà attaquer en justice si nous avons des
nuisances. Comment échapper à l'impact visuel et sonore?
- "Rassurez-vous, ce n'est pas pour tout de suite, et
de toute façon, un projet sur 10 seulement verra le jour." Rassurant???
Nous repartons avec de la documentation de l'ADEME et une invitation à visiter
une ferme éolienne en Allemagne.
RECHERCHE DE DOCUMENTATION
Nous avons lu soigneusement la documentation de l'ADEME et tout ce que nous
avons pu trouver sur le sujet par la suite et notre inquiétude n'a fait que
grandir. Nous n'avons jamais été invités à visiter la ferme éolienne.
Pourquoi???
- Dans un premier temps, ce fut l'abattement et une certaine mauvaise
conscience, car comment lutter contre un projet qui apparaît écologique, et
dans lequel les propriétaires terriens et certains maires voient une mine d'or
et rien d'autre?
- Le mat de mesure du vent est arrivé. Rien que son impact a commencé de
faire réfléchir d'autres personnes. Le maire nous a prévenu qu'une éolienne ne
serait pas implantée, à l'endroit prévu. On aurait pu entendre son bruit...???
- D'abord, un projet qui a un impact visuel aussi important et aussi négatif
ne peut à nos yeux être un véritable projet écologique: les éoliennes sont
énormes, les pales tournent et elles sont surmontées d'un double feu à éclat
(qui nous a été dissimulé). Tout cela attire immanquablement le regard.
Comment profiter de la quiétude d'un jardin? Puisque nous n'avons pas été
invités, nous sommes allés voir, de nous même, des éoliennes. Les pales qui
tournent au dessus des toits de certaines maisons de certains villages sont
pour nous bien gênantes et nous comprenons parfaitement que ces maisons
subissent une décote immobilière. Les documents de l'ADEME parlent de l'impact
visuel et la nécessité d'intégrer les éoliennes dans les paysages. Les
documents de l'ADEME cherchent souvent à minimiser les impacts négatifs et
prévoient même les réponses à effectuer aux opposants! Les éoliennes qui
servent aux études sont d'ailleurs plus petites que celles qui nous sont
prévues. Quant à l'impact sonore, nous avons constaté qu'il n'est pas
inexistant. Certaines éoliennes sont vraiment très bruyantes et leurs bruits
sont très désagréables (des exemples récents en témoignent : Goariva, près de
Plougras, en Bretagne, Avignonet, Sallèles-Limousis), d'autres moins, mais
quel bruit feront-elles quand elles auront vieilli, et quand tourneront les
ventilateurs qui empêchent la surchauffe l'été? Le masquage n'existe pas
réellement, comme nous le pensions et la décroissance du bruit est vraiment
très lente après 300m. Être au centre d'un étau d'éoliennes n'apparaît guère
réjouissant.
- Un jour, nous avons vu, d'autres promoteurs faire une étude sonore à
Baromesnil. La personne nous a avoué qu'elle était étonnée d'enregistrer aussi
peu de bruit dans la région.
- Quant aux infrasons générés par les éoliennes, qui se propagent plus loin
que les sons audibles, il semble bien qu'ils posent des problèmes de santé
publique. (Voir le manifeste de Darmstadt).
- Quand on réfléchit au 4 000 tonnes de CO2 évitées par an par éolienne, on
se pose bien des questions. En France, notre électricité est essentiellement
d'origine nucléaire, et par conséquent déjà non émettrice de G.E.S..
L'adaptation aux besoins de consommation est régulée par l'hydraulique et
quelques centrales thermiques classiques. Si comme certains l'espèrent,
l'éolien remplaçait un peu de nucléaire, la France n'éviterait donc RIEN.
Pire, en cas d'éolien massif, comme l'énergie provenant du vent est par
essence même, variable et aléatoire, de nombreux scientifiques précisent que
la régulation de l'électricité d'origine éolienne ne peut se faire que par des
centrales thermiques (le développement de l'hydraulique n'est pratiquement
plus possible et réguler l'éolien avec de l'hydaulique, moins cher, ne réduit
pas les émissions de gaz à effet de serre). Il faudrait donc remettre en
fonctionnement ou même construire de telles centrales, or elles émettent des
gaz à effet de serre. Nous aurions L'EFFET CONTRAIRE à celui recherché. Le
Danemark (éolien 17% et thermique classique) a fait régulièrement partie ces
denières années des pays européens qui émettent le plus de gaz à effet de
serre par habitant. En outre, de nombreuses coupures affectent son réseau. En
cas d'implantations massives, la régulation du réseau risque de devenir un
problème insoluble. Des idées, plus efficaces, pour éviter les rejets de gaz à
effet de serre sont à chercher ailleurs. A ce sujet, lire les études de
Jean-Marc Jancovici.
- Les promoteurs mettent en avant la quantité d'électricité produite par une
éolienne, mais oublient toujours de préciser de façon sérieuse, le nombre
d'éoliennes qu'il faudrait implanter, par exemple, pour obtenir la production
d'une centrale comme celle de Paluel. Le nombre estimé et l'occupation au sol
donnent des quantités effrayantes même en faisant référence à des documents de
l'ADEME (de l'ordre de 15 000 éoliennes de 1 MW, en comptant l'équivalent
d'environ 2500 h de fonctionnement à puissance maximale par an et par
éolienne). Augmenter la puissance des éoliennes permet de réduire ce nombre,
mais il reste énorme et les aérogénérateurs sont en contre partie de plus en
plus haut. De plus, demeure le problème que c'est une production annuelle qui
est estimée, et non une production adaptable aux besoins. La régulation du
réseau pourrait imposer des coupures, comme au Danemark. Et les 12 000MW
éoliens allemands n'ont rien produit pendant la canicule de l'été 2003.
Quant aux 1200 foyers par éolienne de 1,8MW, il faut entendre HORS CHAUFFAGE.
Sans chauffage électrique, si vous avez congélateur, chauffe-bain électrique,
four électrique ..., regardez votre consommation annuelle et calculez combien
de foyers comme le votre, une éolienne de 1,8MW pourrait alimenter (elle peut
produire de façon optimiste: 1,8MWx2500h soit 4 500MWh ou 4 500 000kWh par an.
Il y a fort à parier que vous trouviez entre 600 et 800 foyers. Il est vrai
que s'il n'y a que cette éolienne, vous consommeriez moins, puisque les jours
sans vent ou à vent trop faible, vous feriez de sérieuses économie
d'électricité (les appareils électriques, eux, apprécieraient peut-être moins
l'irrégularité de la production). Mais, nous extrapolons, puisque nous avons
encore des sources fiables d'approvisionnement.
- Étonnant : les élus de notre région, maires compris, n'ont marqué aucune
opposition, bien au contraire, à la réalisation de l'EPR à Penly. Là aussi,
les communes devraient avoir des retombées financières. Quand nous avions dit
que les éoliennes n'empêcheraient pas le nucléaire...
- On peut aussi se poser des questions quant à la fiabilité du matériel et
de sa maintenance. Plusieurs bris d'éoliennes ont déjà eu lieu : dernièrement,
le 31 décembre 2003, près de Boulogne, au Portel, une éolienne, érigée depuis
un peu plus d'un an, s'est brisée, fort heureusement en pleine nuit. Le
démontage des autres éoliennes a été ordonné. Le vent a aussi arraché une pale
d'une éolienne de Wormhout, le 26 février 2002. D'autres accidents sont
recensés, y compris des incendies (il faut un point d'eau à proximité des
éoliennes).
- Il ne faudrait pas non plus minimiser les perturbations apportées à la
réception de la télévision terrestre, ni l'effet stroboscopique avec le
soleil, puisque les éoliennes prévues sont de plus en plus hautes.
- Nous prenons aussi conscience que bien des projets existent, en
Seine-Maritime et dans toute la France. Que nous prépare-t-on réellement? Que
va devenir notre région, et la France? Néanmoins, quelques maires, tels celui
de Varengeville-sur-Mer, s'opposent à ces projets anarchiques, confiés à des
communes, alors qu'il s'agit d'aménagement du territoire. Il refuse
catégoriquement toute implantation sur sa commune.
- La manne financière promise aux communes et propriétaires laisse songeur.
Pour les communes, avec la suppression de la taxe professionnelle, l'avenir ne
nous paraît pas clair et la somme touchée pourrait bien être nettement moins
importante que celle prévue. Des calculs, non faits par les promoteurs, sont
moins optimistes. Peut-on faire confiance à de multiples entreprises privées
dans le domaine de la production électrique? Si elles abandonnent avant la fin
de l'exploitation, c'est la commune qui gérera les problèmes. Dans le monde
économique, tous les moyens sont bons. A Widehem ( et à Dunkerque), des
éoliennes, qui ont trois ans d'exploitation, sont déjà à vendre : elles
connaissent trop de dysfonctionnements, et la société qui les gère est en
proie à des difficultés financières. La région, principale actionnaire, dit
avoir d'autres chats à fouetter (Montreuil Hebdo, 28 janvier 2004). Pour les
propriétaires, c'est parfois la déception quand ils ne sont pas pas
pressentis. En cas de projet réalisé, si les éoliennes sont un jour démontées,
la plus grande partie du socle de béton restera comme témoin.
Dans le courrier Picard du 7 février 2004, un article révèle que la société
versera un loyer annuel de 6 100€ pendant 20 ans (40% au locataire, 60% au
propriétaire). Comment résister devant de telles sommes? Mais elles suscitent
bien des jalousies. Dans certains villages, la zizanie apparaît.
- L'arrêté du 8 juin 2001, qualifié de "moment d'égarement", par le député
de l'Orne, J.C. Lenoir (Ass. Nat., oct. 2002), oblige EDF à acheter
l'électricité d'origine éolienne à un prix exorbitant. Sa filiale RTE doit
gérer les problèmes de transport et de régulation. Conséquence, un surcoût non
négligeable de l'électricité sera généré par le développement de l'éolien en
France. Le rapport des députés C. Birraux (UDF) et J. Y. Le Déaut (PS)
préconise, page 178, que les français doivent être informés de cela dans la
plus grande transparence. Jamais, les promoteurs ne le disent. Au contraire,
les français sont désinformés habilement par ces derniers pour que l'éolien
soit bien accueilli, malgré tous ses défauts. Est-il nécessaire de défigurer
la France, pour enrichir quelques sociétés privées, sans que nos problèmes
d'énergie soient vraiment résolus, au détriment du consommateur d'électricité
et du contribuable? D'autres voies doivent être étudiées sérieusement. De
nombreuses études et sites existent déjà. Il faut encourager la recherche dans
d'autres domaines.
- Une réunion publique s'est tenue le 13 novembre 2003 à St-Rémy. Et là, des
interrogations, des inquiétudes et des oppositions de plus en plus nombreuses
sont apparues. Même le maire a montré son scepticisme sur plusieurs points et
s'est interrogé sur la possibilité d'extension de son village, si des
éoliennes étaient implantées à 500 m de celui-ci. Plusieurs habitants des
villages concernés ont annoncé qu'en cas de nuisances (sonores, visuelles,…)
ils porteraient plainte, à l'encontre des promoteurs, maires et Préfet. Un
article de l'Informateur du 20 novembre 2003, intitulé " Les éoliennes de la
discorde " en fait l'écho. Et l'idée de créer notre association est venue.
- A chaque fois que nous pouvons exposer en détail notre point de vue, nous
gagnons des sympathisants ou des adhérents.
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